Ici, ne sont que des maux, des doutes aussi...
Les jolies choses, les éclats de rire, les joies, je les garde précieusement, égoïstement, au fond de moi, comme un trésor que l'on préserve du temps....
Ici ? Un simple exutoire... Des bouts de vies, des bouts d'envies, des cris d'écrits, des peines... Au fil de mes jours... Au fil de mes émotions...
A toi qui liras ces lignes, j'ai juste besoin de hurler parfois... Mais je vais bien ne t'en fais pas...

IsabelleC.

jeudi 27 novembre 2008

Rendez-vous manqués

Chacun voit midi à sa porte
Quand il ne cherche pas midi à quatorze heures
Et l'heure n'est jamais la même chez tout le monde
Avec ça, comment voulez-vous qu'on se croise les uns les autres ?

IsabelleC.

dimanche 23 novembre 2008

12 ans

12 ans
il y a déjà 12 ans
je me trimballais
dans une robe plus tout à fait blanche
une de ces robes dont rêvent toutes les petites filles
une robe toute longue
une robe toute magique
une robe unique
une robe, la plus belle de la soirée

12 ans
12 ans déjà que le matin je me levais
le ventre en huit
12 ans déjà que je ne voulais plus y aller
mais la mairie était déjà signée depuis 4 mois, alors...
12 ans déjà que j'ai rejoint tout le monde
le coeur un peu triste
de ne pas être aussi heureuse que j'aurai dû être
12 ans déjà que je me suis mentie toute cette journée

12 ans
une autre vie
une autre Isabelle
ce n'était pas moi
c'était une erreur
c'est impossible

12 ans plus tard
cette belle robe est déchirée, teintée toute grise
une belle robe de sorcière
12 ans plus tard
je suis devant mon pc
mon chien sur les genoux
et ce soir personne ne prendra toute la place dans le lit

12 ans plus tard
je ne sais toujours pas Qui je suis
je sais seulement que
il y a 12 ans je n'étais pas à ma place

12 ans
et 12 ans plus tard
je ne l'ai toujours pas trouvée
ma place

IsabelleC. le 23 novembre 2008

dimanche 16 novembre 2008

Comme une envie...

Comme une envie
de douceur tendre
un havre de paix
quelques heures

Comme une envie
de prairie, de forêt
de vent dans les arbres
pas très loin

Comme une envie
de chaleur
dans une cheminée
contre lui

Comme une envie
qu'il me serre
très fort
dans ses bras

Comme une envie
qu'il me protège
contre tout, contre tous
de sa force

Comme une envie
d'être belle
essentielle
dans ses yeux

Comme une envie
de lui dire
qu'il me dise
c'est Nous

Comme une envie
vitale
de lui
de qui...

Utopie

IsabelleC. à... personne...

samedi 8 novembre 2008

Catastrophes

C'est curieux cette propension qu'on peut avoir à se détacher des choses
Parce que ça n'arrivera toujours qu'aux autres
On regarde les JT, on lit les journaux, on écoute la radio
On entent
On lit
On voit
Intempéries
Innondations
Des familles ont tout perdu
Tout
Ils ont gagné le désespoir d'une vie ruinée
Pas très loin de chez soi
Mais tellement loin de moi
Et puis on passe un coup de fil
On appelle un ami
Comme ça, pour prendre des nouvelles
Comment tu vas ?
J'ai plus de voiture
Intempéries
Innondations
A 1/2 heure de route de chez soi
Tout près de moi
Et on prend tout ça dans la figure
Ca n'arrive pas qu'aux autres
C'est quelques fois très loin de soi
Mais ça peut être vraiment tout près

IsabelleC. à Laurent

Mensonge...

"On m'a dit que le Père Noël n'existe pas !
Dommage, moi qui lui avais commandé un Prince Charmant..."
Anonyme

jeudi 6 novembre 2008

Contine du soir...

... ou petit blog qui ne sert à rien

j'ai l'cœur tout sec
et dans ma tête
y a plein d'arêtes

IsabelleC.

mardi 4 novembre 2008

Vendredi 8h30... ou catharsis

 Un essai, un exercice... Rien de plus...

I.

Vendredi 8h30
Elle ne veut pas arriver trop tard à Lyon, et à cette heure de pointe, combien de temps lui faudra-t-il pour rejoindre le périphérique ? Gare de l’Est, Bastille… Elle ne sais plus, elle est perdue dans cette ville. Elle verra bien, elle trouvera bien un panneau qui l’inspirera. Sans compter la pluie, pour un mois de juin, l'été ne risque pas d'être caniculaire cette année encore…
Trop peu dormi. La nuit a été tellement interminable. Il est venu la rejoindre dans la chambre d’hôtel, il devait être 20h, elle était encore dans son bain. Cette chambre minable, pour un 2* à ce prix-là… A Paris, tous les excès sont permis, vraiment.
Et cette séance photo détestable, elle n’arrive pas à donner quelque chose de bon. Elle se sent si moche. Le malaise est là, on pourrait presque le toucher. Je crois que j’ai besoin d’être amoureuse du photographe pour réussir à donner le meilleur de moi. C'était si simple avec Jean-Yves à Noël. Alors que lui, Fred, je n’arrive pas à l’aimer, même un peu.
Il est tard, le lendemain elle aura 500km à parcourir, alors il est préférable qu'ils dorment. Même si elle ne l’aime pas, il a un corps attirant, rassurant, il est techniquement un bon amant malgré un manque évident de tendresse qu’il compense comme il peut par un peu de douceur, elle le sait puisque ils se sont enlacés toute leur première nuit ensemble, sans un seul moment de répit. Et pourquoi ne pas dormir un peu plus tard ? Pourquoi priver leurs corps ? Il en a envie lui aussi.

Et là, tout dérape, la colère, la violence… Pourquoi, elle ne comprend pas. Elle ne le comprend pas… Elle l’esquive, elle tente de l’apaiser… Rien à faire. Encore une nuit qui va être courte, mais cette fois-ci elle va être désastreuse, destructrice.

Dormir quand même un peu, elle doit dormir quand même un peu si elle ne veut pas avoir de problème sur l’autoroute. Elle regarde l'heure. A peine deux heures de sommeil.
Le réveil sonne.
Il part, sans un regard. Elle regroupe ses affaires et quitte la chambre.

Une contravention sur sa voiture, déjà, il est à peine 8h30. C’est un peu exagéré, non ? Paris, la ville où tout va vite, trop vite. Coffre ouvert, sac chargé. A quelques mètres, une école maternelle. Des parents qui embrassent leurs enfants, pour leur dernier jour d'école. Ça lui fait du bien de voir un peu d’innocence et de gaieté. Elle sort vite son appareil-photo, et elle shoote ces moments-câlin, ces bisous-tendresse, ces au-revoir de doudous serrés si fort dans toutes ces petites mains. Elle capture ces instants qui la touchent, la foudroient dans son histoire, dans son désir qu'elle a avorté. Elle fait bien attention à ne pas saisir les visages, elle respecte trop ces moments pour les voler complètement. Elle ne veut attraper que l'émotion. Elle n'est pas là pour voler l'intimité.
La tête lui tourne. Elle manque de sommeil.
Un homme l’aperçoit, un dernier au revoir à sa petite fille qu'il ne verra pas de tout un mois, et il vient vers elle. Elle dérange, elle l'imagine et le comprend. Elle commence à formuler ses phrases en le voyant arriver, pour lui expliquer ne vous inquiétez pas, je suis photographe amateur, je fais bien attention à ce qu’aucun visage ne puisse être reconnu, tous ces moments de bonheur me touchent tellement que je n’ai pas pu faire autrement, je vous présente mes excuses, je m’en vais, je peux vous montrer, vous ne verrez aucun visage…
- Mademoiselle, s’il vous plaît, que faites-vous ?
- Bonjour monsieur, ne vous inquiétez pas, je comprends votre inquiétude, je me permets de vous expliquer : je suis photographe amateur et je… je…
Et elle sombre, elle tombe, trou noir.

- Comment vous sentez-vous ?
Elle ouvre les yeux. Je suis où ? Qui c'est, ce type assis au pied du lit ?… Elle le reconnaît tout en sachant pertinemment qu'elle ne l’a jamais rencontré, surtout que ses seuls amis à Paris n’y sont pas en ce moment. Tout se brouille, elle ne comprend pas très bien. Respire, Ana, respire. Ferme les yeux. Ouvre-les à nouveau. Il est toujours là. Je rêve ou j'hallucine ? On m’a droguée ou quoi ? Elle est dans une chambre qu'elle ne connaît pas avec cet homme assis au pied du lit, avec… Melvin Luther assis au pied du lit. Ce n’est pas possible !
- Que s’est-il passé ? Je suis où ? Vous faites quoi ici ? Je fais quoi ici ? Je ne comprends rien. Et mon appareil-photo ?
- Du calme. Vous avez eu un malaise ce matin devant l’école de ma fille, vous étiez en train de prendre des photos. Je suis venu vers vous pour vous demander d’arrêter et vous vous êtes évanouie dans mes bras. Alors je vous ai ramenée chez moi, le temps que vous vous sentiez mieux, et depuis vous dormez.
- Ah… Il est quelle heure ?
- Il est presque 16h. Le médecin doit repasser dans bientôt.
- Oh non, ce n’est pas la peine. Je vais partir, ne vous embêtez pas. Je vous ai déjà assez ennuyé comme ça. Je suis vraiment désolée, je ne me rappelle de rien, je…
- Ne discutez pas. Attendez que le médecin revienne, on verra après. Vous êtes toute pâle, il est hors de question que je vous laisse prendre votre voiture dans cet état. Et je me présente, Melvin. Et vous ? Toi, je peux t'appeler comment ? Maintenant que tu as dormi dans mon lit, je crois que nous sommes devenus un peu plus intimes ? un sourire à ses lèvres.
- Ana. Je suis vraiment désolée. Je ne sais pas ce qu'il m'est arrivé. Je suis vraiment confuse, je ne veux pas vous déranger…
- Ce qu'il t'est arrivé ? Tu es juste tombée dans les pommes, ce matin. Et depuis, tu dors. Voilà, rien de plus. J'ai déjà vu des fans s'évanouir à mes concerts, mais là, si vite, juste à mon approche, j'avoue que je n'en reviens pas, il faut vite que j'arrête le métier, ça me dépasse vraiment tout ça, ironise-t-il… Ah, ton appareil-photo et tes affaires sont ici, et j'ai pris la liberté de garer ta voiture dans mon garage ce matin, pour t'éviter encore une contravention.
- Merci pour la voiture. Merci pour tout. Dans les pommes… Ok. Mais c'est pas à cause de vous… C'est juste que la nuit a été très difficile. Non pas que vous ne soyez pas à la hauteur de votre popularité… enfin je veux dire… Oh je me tais parce que plus je vais essayer de m'en sortir, plus je vais m'enliser dans les mots. Et si vous arrêtiez de vous moquer, ça m'aiderait bien, là…
- Oh non, tu me fais sourire. Pour une fois qu'on me dit franchement les choses, j'aime, vraiment. Merci jeune demoiselle. Tu veux boire quelque chose ? un verre d'eau, un café, un thé ? un thé à la menthe ? Tu veux quoi ?
Et elle s'assoupit et l'entend fredonner un air de Springsteen dans la cuisine, "Secret garden", tout en préparant un thé à la menthe "un vrai, comme ils m'ont appris dans le désert".

Il prend soin d'elle. Il a vu en la déshabillant le matin-même les bleus, les griffures trop récentes. Et la cicatrice. Il sent bien sa fatigue, son épuisement, sa lassitude. Elle n'en peut plus, elle n'arrive plus à le cacher. Il décide qu'il ne lui posera aucune question. Elle racontera si elle en a envie, besoin, si elle se sent en confiance. Elle réalise qu'il devine quelque chose. Il ne lui demande rien. Dans ses regards, elle l'en remercie. Il sait trop bien qu'à être trop interrogé, on se referme, on ne veut plus parler, on ne veut que le silence, l'isolement, la paix. Il connaît trop bien ce piège, il est tombé dedans l'année dernière quand sa femme est partie. Ils l'avaient décidé ensemble, mais ne plus entendre les rires de leur fille chaque jour était un crève-cœur insupportable.

Le médecin arrive. Stan, son ami d'enfance. De toute façon, depuis qu'il habite dans cet appartement, personne ne rentre sans montrer patte blanche, sincérité et CV. Cet appartement, c'est son refuge, son antre, propriété plus que privée, propriété isolée.

Elle est fatiguée, elle explique, le 13 février, le 12 avril, le 10 novembre, avant sa cicatrice. Elle raconte depuis sa cicatrice. Berlin, le 13 février, Jean-Yves, elle ne peut plus aimer, elle ne veut plus aimer, Berlin, le 10 novembre, le bureau, la misère des autres. Et la fatigue qui s'est installée, toujours là, fidèle… Elle n'en peut plus... Stan l'écoute. Ça va s'arrêter quand tout ça ? Mais jamais mademoiselle, c'est comme si vous mettiez un moteur de 2CV dans un semi-remorque, ça n'avance plus aussi vite, ça coince, c'est poussif.
Lui, à l'extérieur de la chambre, attend. Il écoute, il ne devrait pas, mais il s'inquiète, il a envie de comprendre. Il ne dira pas qu'il a entendu, même si elle l'aperçoit à l'embrasure de la porte, qu'elle sait qu'il entend, mais elle continue de parler, les mots sortent dans un flot incessant et si froid, toutes ses paroles sont glacées, dépourvues d'émotions. Il respectera. Il la respectera.

Ils mangent un peu au dessus d'un plateau-repas, tous les deux assis sur le lit. Ils parlent un peu de tout de rien de la pluie qui est là du beau temps qui tarde un peu, beaucoup de silences, des sourires, des regards gênés parfois, elle est mal à l'aise de cette situation. "Je suis en plein remake de Cendrillon et son Prince Charmant, version série B. C'est pathétique. Tu es vraiment pathétique ma pauvre fille". Elle voudrait partir en courant, elle voudrait même revenir en arrière et n'avoir jamais sorti son appareil-photo ce matin-là. Elle voudrait avoir sauté dans sa voiture, quitte à s'écraser sur la rambarde de l'autoroute. Il la rassure, avec des gestes pleins de gentillesse, avec ses yeux bleus remplis de compassion. Il est touché par cette fille échouée dans son lit. Il n'a pas envie de la brusquer, il n'a pas envie de la compter parmi sa "collection de jambes". Non, pas elle. Elle n'en veut pas à son image de chanteur-comédien reconnu. Elle s'en moque. Elle voudrait juste retourner chez elle, ou à défaut, pouvoir se glisser dans un trou de souris tellement elle se sent honteuse. Et pas à sa place. Il le voit. Il voudrait tout faire pour qu'elle se sente bien, comme chez elle, mais il n'ose pas, il a peur de passer pour ce qu'il a trop été décrit malgré lui, un séducteur, un Don Juan de tabloïdes. Ils sont gauches, maladroits. Ils se croisent. Ils s'observent. Ils s'écoutent.

Elle s'endort. Il relève la couette sur ses épaules. Il dépose un léger baiser sur ses yeux, il s'en veut après, mais c'était plus fort que lui. De toute façon elle dort déjà, elle ne s'en est pas rendu compte. Elle est dans son lit. Il ira dormir dans la chambre de sa fille, au milieu des nounours et des poupées, comme avant, quand il la berçait et qu'il s'endormait souvent avant elle.

Elle crie, elle hurle. Des mots incompréhensibles. Il va voir, vite. Elle dort, elle cauchemarde. Elle se réveille en sueur. Elle tremble. Il la prend dans ses bras pour la calmer. Elle se débat. Elle ne voit pas que c'est lui. Elle revoit l'autre, la nuit précédente, la haine, la violence, les coups. Elle a peur. Elle a froid. Terriblement froid. Il l'apaise, la tranquillise. D'une voix si douce.
- Chhhhhut, c'est moi, c'est Melvin. Tu es en sécurité. Tu ne crains rien. Je suis là. Regarde-moi, c'est moi, Mel.
- J'ai froid, j'ai trop froid.
Il l'abandonne quelques instants, le temps de lui faire couler un bain pour la réchauffer. Il revient, elle est en pleurs, effrayée. "Pourquoi tu m'as laissée ? Me laisse pas, me laisse plus !". Elle pleure tout ce qui lui fait mal, tout ce qui l'a touchée, tout ce qui l'a bouleversée, tout ce qui l'a malmenée, secouée, choquée, blessée, meurtrie. Elle pleure, elle ne peut plus arrêter les sanglots et les larmes qui roulent trop vite sur ses joues. Elle ne comprend pas ce qui lui arrive. Pourtant elle se sent en sécurité, elle sait qu'elle peut se laisser aller. Il la prend dans ses bras et la berce doucement. Sans un mot. Il y a des moments où il ne faut pas toucher au silence. Il est musicien, il le sait. Elle s'épuise, les larmes l'épuisent. Elle tremble encore, elle a encore froid. Il l'emmène à la salle de bains, la dénude avec pudeur et la glisse dans l'eau chaude. Elle se recroqueville, comme un bébé. Il lui masse doucement la nuque et les épaules. Elle se détend, elle se sent déjà mieux. Il la laisse seule, il ne voudrait pas être incorrect.

Au bout d'une demie-heure, il retourne la voir. Elle semble terrifiée, ne plus savoir quoi faire, comment faire, perdue au milieu de toute cette eau tiédie. Il la relève, l'aide à passer le peignoir blanc épais et chaud. Puis la raccompagne dans la chambre, la guide vers le lit, l'allonge sous la couette. Il attend qu'elle retrouve le sommeil. Elle a encore froid, mais semble un peu plus apaisée. Ce bain lui a fait du bien, un peu. Elle est incapable de prononcer un mot. Elle le regarde si profondément pour le remercier, et pour lui demander son aide. Pour lui dire "je n'en peux plus, je ne sais plus… aidez-moi à retrouver un chemin, peu importe lequel, tant qu'il m'emmène loin de tout ça… aidez-moi… aide-moi je t'en prie… je te donne toute ma confiance, je me livre à toi, attrape ma main et guide moi, sors-moi de là, sors-moi de moi".



II.

Samedi 11h00
Une première nuit passée. Un premier matin. Il se réveille tout près d'elle. Elle a si mal dormi, elle a gémi, elle a crié, elle a pleuré, assaillie par toutes ses terreurs. Il a préféré passer la nuit sur le fauteuil en face du lit, pour la veiller. Il s'occupe d'elle comme il le peut, avec le peu qu'il sait d'elle. Presque rien et tellement à la fois.

Tout doucement, il lui réapprend à vivre tranquillement, sereinement. Leur nouveau quotidien s'organise autour d'elle. Elle et ses longues heures passées à dormir, à récupérer, à souffler, à ne se soucier de rien que de son repos. Ses peurs rythment leur vie. Ils parlent un peu plus. Ils échangent des idées, se confient l'un à l'autre parfois. Il prend souvent sa guitare, sa musique les aide à communiquer, à partager. Les cauchemars s'estompent. Les nuits sont plus calmes, mais il reste toujours tout près d'elle, pour bondir sur le moindre rêve malveillant et le chasser de sa tendresse et de son souffle sur ses yeux.

Dimanche 14h00
Déjà dix jours qu'elle se rétabli doucement, qu'il l'accompagne chaque moment dans chacun de ses efforts et de ses progrès. Ils semblent avoir trouvé un équilibre. Leur équilibre.
Première sortie, elle se sent assez forte pour affronter la ville. Le brouhaha incessant des rues parisiennes, les voitures qui vont et viennent, les touristes… Et les groupies, les regards qui se posent sur lui "Mais c'est Melvin Luther !" et sur elle "Mais il est avec qui ? On la connaît pas celle-là, jamais vue nulle part." C'est comme ça, c'est inévitable, elle doit s'habituer. Dans le quartier de leurs premières balades, autour de chez lui, les habitants le connaissent, et ne posent pas de question, il fait partie du paysage tout autant que la colonne Maurisse, ou ce vieux monsieur qui dort sur ses cartons près de la bouche de métro et vend ses journaux pour survivre. De temps en temps on peut entendre "Bonjour m'sieur Melvin, belle journée hein ! Enfin un p'tit bout d'soleil !" ou quelques mots dans la même idée. Rien d'agressif. Ce qui est bien, car ils refusent de se laisser heurter par quoi que ce soit. Ils veulent juste profiter du temps qui passe, se découvrir, s'apprendre l'un l'autre. Ils se rapprochent imperceptiblement au fil des jours, ils se créent une complicité, rient ensemble, se racontent leurs souvenirs, pleurent parfois devant un vieux film un peu mélo. Toujours avec cette distance si fragile qu'ils s'imposent sans se le dire. Par peur de rompre le charme de cette histoire qu'ils écrivent ensemble, la leur. Même si leurs doigts s'effleurent accidentellement, de temps à autre, et s'éloignent trop vite, de peur de gêner l'autre. Les bleus de leurs yeux se confondent déjà tout le temps, alors autant éviter que leurs peaux n'en fassent de même, elles qui n'attendent que ça.

Il recommence enfin à répondre au téléphone. Ses amis s'interrogent sur cette absence qu'il impose et qui ne lui ressemble pas. Il hésite à leur parler d'elle. Ils ne comprendraient pas. Ils ne comprendraient pas que je l'ai recueillie chez moi, ils ne comprendraient pas qu'elle dort dans mon lit et moi dans le fauteuil, ils ne comprendraient pas que nous ne nous touchons pas comme ils l'entendent, que nous ne nous embrassons pas, que nous ne faisons pas l'amour. "Mel, sors, rencontre des filles, bouge-toi, séduit, drague, couche avec elles, elles n'attendent que ça !" Et là, elle, toute cette attention, toute cette pudeur entre elle et lui, ils ne comprendraient pas. Mais elle fait partie de sa vie, elle en fait partie intégrante. Elle est là, elle prend toute la place qu'il lui laisse, qu'il lui offre. Alors pourquoi la cacher encore ? Ils ne s'embrassent pas, ils ne dorment pas ensemble, et après ?… Quelle importance ce qu'en pensent les autres. Si ses amis sont de vrais amis, ils accepteront à défaut de comprendre.

Lundi 13h00
Ils se promènent dans le Marais et croisent Tybalt Kostja, dans une galerie d'art. Les deux grands amis s'embrassent.
- Tybalt, je te présente Ana.
- Ravi, mademoiselle.
Elle tend une main timide à cet homme dont elle admire le nouveau travail musical, la carrière internationale et surtout les yeux bleus qui ont osé défier Angeles Jelka, la plus belle star Hollywoodienne, cette trop brune trop belle trop tout trop déprimante…
Ils décident de déjeuner ensemble. Enfin un moment pour se voir depuis presque six semaines. Ils s'attablent à une terrasse, tout près de l'église Saint-Gervais. Ana est désorientée. Quelle est sa place entre ces deux noms du 7ème Art français ? Elle se dit qu'elle va se réveiller. C'est incroyable. Si il lui avait été raconté un jour qu'elle se retrouverai là, à cette table de brasserie parisienne, à côté de Luther et en face de Kostja, jamais elle ne l'aurait cru.
Elle n'ose rien dire. Elle s'arrête ici dans la conversation. Ils entament un débriefing de l'Olympia du mois dernier, où Melvin a prêté la scène à Tybalt le temps d'une chanson, une reprise d'Otis Redding, "Sitin' on the dock of the bay". Elle les laisse parler, elle les écoute. Elle n'ose pas intervenir, elle est bien piètre musicienne pour se permettre une quelconque réflexion. Elle se sent si petite. Que fait-elle là ? Elle ne se sent pas à sa place, vraiment pas. C'est carrément du grand n'importe quoi cette situation.
- Vous avez assisté au concert, Ana ? lui demande Tybalt… Anabelle ?
- … Pardon, vous m'avez parlé ? Excusez-moi, je ne vous écoutais pas, je vous laissais discuter entre vous, je ne voulais pas m'immiscer, je suis confuse… elle est surtout déroutée par sa carrure et sa prestance, le calme qu'il dégage, et particulièrement par le regard qu'il porte sur elle et Melvin, un regard bienveillant, un regard qui leur souhaite d'être heureux ensemble, un regard inutile puisqu'il ne se passe rien, quel imbécile ce Tybalt.
- Je vous demandais si vous avez assisté au concert.
- Non, je ne suis sur Paris que depuis deux semaines, et je vais bientôt rentrer chez moi.
A cette annonce, Melvin s'assombrit, son visage se ferme, il est touché, attristé par cette nouvelle, mais il ne le dira pas. De quel droit lui demanderai-t-il de rester alors qu'il ne se passe rien d'autre entre eux qu'une amitié grandissante ? Qui a déjà peut-être trop grandit…
- Ah bon ? Et vous êtes d'où ?
- Je suis lyonnaise.
- Ah ! Lyon… La Croix-Rousse, ses traboules, ses bouchons… Une belle ville, Lyon. Je n'y suis jamais resté longtemps, mais j'aime bien, surtout la nuit. Dis, Melvin, tu connais toi ? Tybalt l'a questionné tout naturellement, pour essayer d'en savoir plus sur les liens qui l'unissent à cette jeune fille timide et pourtant là, rien à voir avec toutes les autres femmes qui se sont pavanées au bras de son ami, rien à voir même avec son ex-femme, une façon de poser la question avec beaucoup de discrétion, comme à son habitude.
- Non, pas encore, j'y suis passé quelques rares fois pendant mes tournées, c'est tout… et un temps sans paroles, durant lequel toutes les pensées, toutes les interprétations se jettent à cœurs perdus. Ana veut rompre ce silence trop lourd, elle se lance, elle ose :
- Je suis tombée un jour complètement par hasard à la Fnac, sur "Ce lien qui nous unit". Je l'ai acheté, très attirée par les photos, cette connivence entre ce magnifique cheval blanc et vous... J'ai beaucoup aimé dans l'ensemble. Pas tout, mais une bonne partie.
- Ah bon ? C'est si rare de rencontrer des gens qui connaissent mon CD, qui savent que je chante aussi. Merci, jeune demoiselle, lui abandonne-t-il avec un sourire tellement chaleureux et sincère.
Et ils échangent leurs impressions, passent en revue chacun des morceaux de cet album. Elle est heureuse de participer un peu à la conversation.
Ils se séparent, enchantés de ce déjeuner inattendu. Elle trouve qu'elle s'en est pas trop mal tiré, même si ce n'est pas si facile pour elle, non pas de converser, bien qu'elle est assez réservée en général, mais surtout de passer outre le regard des passants, et surtout des passantes, tournés vers les deux hommes et par débordement sur elle aussi. Melvin et Tybalt n'y ont sans doutes pas fait attention, leur quotidien doit grouiller de ces regards envieux, cupides. Mais plus d'une jeune fille, plus ou moins jeune d'ailleurs, a observé avec convoitise les deux hommes, et a fait glisser ses yeux sombres sur la jeune femme qui osait partager "leur table à Eux", avec interrogation et jalousie.

Jeudi 15h00
- Un dîner tout ce qu'il y a de plus simple, rassure-toi Ana.
- D'ac. Il y aura qui ? Enfin non, ma question est stupide, je ne connais pas ton monde. Je voulais dire, on sera combien ?
- Oh, juste Jeffrey et Lucie avec leur fille, Stan, et Jean-Paul est à Paris, il viendra aussi, et puis Coralie peut-être. Donc on sera sept et la puce.
Elle lui demande de préciser : Jeffrey et Lucie Henry, rien que ça, et Jean-Paul Golven, ben voyons… Et Coralie… Elle a peur de la réponse : Coralie Kraft. Cette si jolie jeune fille aux long cheveux bouclés qui lui a chanté, à lui, "Je ne veux qu'Il" sur son album précédent. Anabelle est jalouse, pas cette fille bien plus jolie que moi, bien plus talentueuse, bien plus charmante, bien plus charmeuse, non, pas elle. Elle aurait voulu lui chanter, elle, Ana à lui, Melvin "J'ai beau chercher d'autres arrivées, je ne veux qu'Il" et lui, lui répondre à elle "J'ai beau savoir, ne plus y croire, je ne veux qu'Elle" à elle, pas à l'autre, pas Coralie, non.
Voilà, pour lui, un dîner tout ce qu'il y a de plus simple. Pour elle, l'impression d'être plongée de force dans un magazine people à grand tirage. Un de ces magazines pour voyeurs, pour ceux qui n'ont tellement rien dans leur vie qu'ils volent celle des autres pour rêver un peu, et se regarder, et regarder leur vie, et vouloir se tailler les veines après un peu aussi.
- Et tu veux que je fasse quoi au milieu de vous tous ? Tu veux que je parle de quoi ? Stan ne sera pas ici pour faire le doc, Golven, je pourrai toujours lui parler de son ami Dédé, et de Eric "la Tchatche", des copains de bringue d'il y a quelques années, des voisins de Mike Jent. Mais les autres, je leur parle de quoi ? Des dernières horreurs que j'ai lues quand j'étais aux plaintes ? Ou bien des congels remplis de viande froide dans les labos de la scientifique ? Je peux même raconter le squelette de bébé, parti dans les déchets biologiques à défaut de sépulture… elle est agressive, elle s'en rend compte, elle s'en veut mais c'est plus fort qu'elle, elle panique. Je peux aussi vous raconter les fins de mois difficiles, les factures à régler on ne sait pas comment, les dossiers pour les allocs, le garagiste qu'on ne pourra pas payer… Je ne suis pas de votre monde Melvin, je n'ai rien à faire à ce dîner, je vous laisserai entre vous, je veux pas y assister, c'est pas possible, je pourrai pas.
- Hey, Ana, t'inquiète pas, ils sont comme toi et moi, ils sont normaux, ils ont deux bras, deux jambes comme tout le monde, ne panique pas comme ça. Et tu leur raconteras tes photos…
- Tu es sûr ? Je me sens vraiment pas à la hauteur. On est trop différents, on…
- Regarde nous deux, tout se passe très bien, et pourtant si je rejoins ton raisonnement, je fais partie de leur monde, pas du tien, donc on a rien à faire ensemble... Alors il n'y a aucune raison pour que ça se passe mal, et je serai là, c'est pas comme si tu étais seule face à eux.
Oui, peut-être, elle n'est pas convaincue, mais soit. Elle veut bien essayer. Elle veut lui faire plaisir, et puis c'est une façon de le remercier pour tout ce qu'il fait pour elle depuis plus de dix jours. Et puis elle aura peut-être des nouvelles des deux compères Dédé et Eric "la Tchatche", sait-on jamais…
- Et puis elle sera là, je suis pas sûre de m'en sortir là, pas elle… elle a exprimé sa jalousie, cette jalousie bassement féminine, cette jalousie qui la révulse au plus haut point mais qu'elle ne contrôle pas. Non, pas elle, j'ai plus qu'à faire mes bagages et prendre la route maintenant. Je peux pas rester à côté d'elle, c'est pas possible.
- Elle ? Qui, Elle ?
- … Coralie Kraft.
- Coralie ? Mais tu crois quoi ? Que Coralie et moi…? Mais non, rassure-toi, non.
- On a le même âge sensiblement, elle est tellement belle, elle a réussi, et moi… Moi j'ai tout raté… Pas elle s'il te plaît. Elle me fait peur, me retrouver en face d'elle me fait peur. Me retrouver en face de la beauté et la réussite alors que je suis moche et que j'ai échoué de partout me fait peur… et les larmes mouillent ses jouent.
- Vous n'avez pas eu la même vie, vous n'avez pas eu les mêmes chances. Et pourtant vous êtes là toutes les deux, chacune différente, mais toutes les deux avec ce point commun : ici, ce soir, à cette même table. Tu es là, tu as eu une route tortueuse, difficile, il t'en a fallu du courage Ana pour arriver ici…
- Tu parles, je suis ici parce que je me suis effondrée au bon moment au bon endroit, je n'ai aucun mérite, juste de la chance, pour une fois…
- Non. Je parle de tout le chemin avant. Tu as eu la force d'avancer alors que plus d'un ou plus d'une aurait baissé les bras. Merde Ana !! Tu es là et tu prends toute la place et j'aime que tu prennes toute cette place !! Et ce sera à Coralie de se remettre en cause, pas à toi. A elle de prendre une leçon de courage et d'humilité. Tu Es Là bordel !! N'oublie jamais que Tu Es Là. Viens dans mes bras, viens ma belle…
Il l'enlace, il la serre aussi fort qu'il le peut contre son corps, contre son cœur, il veut la rassurer, il veut la bercer, la protéger de tout. Il efface ses larmes avec ses baisers. Il voudrait l'embrasser, poser ses lèvres sur les siennes, mais il se l'interdit. Elle s'abandonne dans les bras si forts de cet homme qui est en train de briser toutes les carapaces qu'elle avait bien prit soin de reconstruire une à une après Jean-Yves. Elle refoule ses envies, elle refuse d'écouter son corps, son cœur, elle ne veut pas gâcher ces merveilleux moments ensemble. Et surtout elle ne veut plus souffrir, alors elle ne veut plus aimer, jamais. Demain elle partira, ce sera mieux. Elle a tellement peur de lui faire mal qu'elle ne trouve pas le courage de lui annoncer maintenant, dans ce si doux moment. Elle lui dira plus tard, quand elle aura préparé ses bagages… Demain…



III.

Jeudi 21h00
Ils sont tous attablés. Elle s'est sentie dévisagée pendant l'apéritif, observée, par Lucie et Coralie, d'un air si supérieur. Comme pour lui dire qui es-tu toi, la nouvelle curiosité qui ose accaparer Notre ami ? Et au cours du repas, les œillades de Coralie à Melvin, elle se demande ce qu'il fait avec cette provinciale, et il a la délicatesse de ne pas lui répondre.
Et Lucie qui méprise tant ceux qu'elle appelle les petites gens, celles qui ne sont pas du même monde qu'Eux, artistes. Pourtant celles-là même qui lui permettent justement de vivre dans ce monde de nantis, en achetant les albums de son mari, en allant voir ses films, en payant jusqu'à 150€ pour un seul de ses concerts… Pour une ambassadrice d'ONG internationale, de tels positionnements ne sont pas très corrects. Ana le lui fait remarquer.
- Mais qui es-tu pour oser de tels propos Ana ? Tu ne connais rien à nos vies, les sacrifices que nous devons faire, tous les problèmes que nous pouvons avoir.
- Non, c'est vrai. Par contre je sais ce que c'est que d'aller travailler 8 heures par jour, enfermée dans un bureau, pour un métier qui ne nous plaît pas, quand il ne nous détruit pas,
pour gagner à peine de quoi survivre une fois qu'on a payé toutes les factures.
- Mais c'est que toi, tous ces gens, vous avez fait les mauvais choix, ce n'est pas de notre faute à nous, célébrités, si vous n'êtes pas capable de faire partie de notre cercle.
- Les mauvais choix ? La plupart des gens dans ce pays ont un seul choix : aller travailler quel que soit le job et le salaire et les conditions, ou bien se retrouver à la rue.
- Ce n'est pas de ma faute.
- Je n'ai jamais dit que c'était de ta faute, Lucie. Seulement je trouve que tu manques fortement de considération pour ces gens-là, surtout que ce sont eux qui vous font vivre, toi et ton mari, vous tous artistes, ne l'oublies pas. Et je trouve que ce manque de considération est regrettable pour des gens qui prêtent leur nom aux Restos du Cœur, entre autre, à toutes ces associations caritatives qu'ils représentent… Des associations qui ne se veulent qu'altruisme, et non pas outils de promotion. Je vais même te dire qu'un tel mépris pour le public et de tels propos me dégoûtent. Je ne comprends même pas comment tu peux penser tout ça.
- Il y a deux camps dans la vie, les chanceux qui ont de l'argent, et les autres. Ne reproche pas aux autres, au monde entier d'être tombée dans le mauvais camp ma chérie.
Et Ana se lève de colère. Comment supporter un tel discours ? Elle va se réfugier dans la cuisine en prétextant aller chercher la suite du repas.
- Très bien chère Ana, chacune à sa place. Moi ici avec mon mari et mes amis, et toi à la place des petites gens.
Ana contient sa rage aussi bien qu'elle peut. Melvin la rejoint. La discussion s'anime, s'électrise dans l'autre pièce. Elle n'entend pas, tellement la colère l'envahit. Elle n'entend pas Jean-Paul et Stan qui rappellent à Lucie son privilège de mener cette vie, et pourquoi les Restos existent encore, malheureusement…
- Mais pour qui elle se prend ? Tu as entendu son discours ? Parce qu'elle s'appelle Henry elle est devenue la reine du monde et a le droit de mépriser les autres ? C'est qui, cette conne ? Et elle a osé m'appeler ma chérie ! Mais elle est vraiment puante !
- Calme toi Ana. Laisse-la dire ce qu'elle veut. On sait, personne n'est dupe, elle ne changera pas. Elle est méprisante, Tout Paris la connaît.
- Et puis vous ensemble et moi à la cuisine, elle me prend pour qui ?
- Chhhhhhut… il la prend dans ses bras. Ils se regardent quelques secondes. Des secondes qui semblent de longues minutes. Il dépose un baiser sur ses lèvres, tout naturellement, pour la rassurer. Elle est surprise ! Elle fuyait ce geste et elle en avait envie depuis si longtemps. Elle ne sait plus quoi penser.
Ils se lâchent tout aussi vite et retournent autour de la table. L'ambiance est froide. Les propos de Lucie ont choqué, la véhémence avec laquelle a réagit Ana a surprit. Elle ne se laissera pas faire. Elle se sent en trop. Elle est encore en convalescence, elle est fatiguée, elle s'excuse, salut tout le monde et va s'enfermer dans la chambre, au calme. Elle part dans sa bulle, elle s'isole du reste du Monde, dans Son monde A Elle. Elle s'endort.

Elle se réveille en sursaut, n'entend plus de bruit dans l'appartement. La nuit est noire et silencieuse. Elle jette un œil sur le réveil, presque 3 heures. Tout lui revient. Ces dix jours, lui, hier soir, lui… Lui… Elle réfléchit. Elle doit rentrer chez elle. Elle n'appartient vraiment pas à ce monde du paraître. Et elle ne veut plus aimer. Et elle se sent glisser dangereusement vers les douleurs du cœur. Tout passe si vite dans son esprit. Partir, vite, tout à l'heure. Elle se lève, enfile son peignoir, va boire un verre d'eau dans la cuisine. Elle le voit. Il est assis par terre, adossé au canapé, comme il aime, dans la pénombre, à la lueur de quelques bougies et des lumières de la ville, sa guitare dans les bras, il joue tout doucement, il chantonne. Elle entre dans le salon, il ne la voit pas, ne l'entend pas arriver, il lui tourne le dos, il est plongé dans sa musique. Il compose, il est inspiré. Les notes et les mots coulent d'eux-mêmes… Elle s'approche, debout tout contre lui.
- Melvin, je pars demain matin… il la regarde, ébahit, assommé par la nouvelle.
- Ce n'est pas possible Ana. Non.
- Si, Mel. Je ne suis pas à ma place ici. Nous n'appartenons pas aux mêmes foules. Et je préfère partir tant qu'il n'est pas trop tard encore.
Il pose sa guitare. Ce soir, il composait pourtant grâce à elle. Pour Elle "… Moi qui n'avais plus l'envie d'aimer, me voilà pris dans le tourbillon salé des larmes et des baisers, des rires et de la joie de vivre…" Il tend le bras, lui attrape doucement les jambes, la plaque contre lui. Glisse une main sous le peignoir. Pose sa main sur sa cuisse. Défait le nœud de la ceinture. Respire cette peau qui l'attire tellement depuis qu'il la vue devant l'école. La pousse tendrement sur le canapé. L'enlace. L'embrasse si fort. Comme assoiffé d'elle. La caresse. Elle murmure il ne faut pas. Elle se laisse faire pourtant… Elle lui enlève sa chemise. Leurs corps se touchent enfin. Leurs peaux se reconnaissent. Il la porte jusque dans la chambre. Ils s'unissent... Ils s'offrent l'un à l'autre, l'un pour l'autre. Se donnent leurs plaisirs. Avec douceur. Avec force. Avec tendresse. Avec un immense amour…
Ils s'aiment et s'en épuisent. Ils se sont enfin trouvés. Ils se sont reconnus.
- Et demain ? elle ose à peine prononcer ces deux mots, tellement effrayée par la réponse.
- Demain, ensemble. Toujours.
Il la rassure. Il se rassure…
Ils s'endorment, ensemble. Pour la première fois ensemble, pour l'éternité ensemble…



IV.

Vendredi 8h30
Elle ne veut pas arriver trop tard à Lyon, et à cette heure de pointe, combien de temps lui
faudra-t-il pour rejoindre le périphérique ? Gare de l’Est, Bastille… Elle ne sait plus, elle est perdue dans cette ville. Elle verra bien, elle trouvera bien un panneau qui l’inspirera. Sans compter la pluie, pour un mois de juin, l'été ne risque pas d'être caniculaire cette année encore…
Trop peu dormi. La nuit a été tellement interminable. Il est venu la rejoindre dans la chambre d’hôtel, il devait être 20h, elle était encore dans son bain. Cette chambre minable, pour un 2* à ce prix-là… A Paris, tous les excès sont permis, vraiment.
Et cette séance photo détestable, elle n’arrive pas à donner quelque chose de bon. Elle se sent si moche. Le malaise est là, on pourrait presque le toucher. Je crois que j’ai besoin d’être amoureuse du photographe pour réussir à donner le meilleur de moi. C'était si simple avec Jean-Yves à Noël. Alors que lui, Fred, je n’arrive pas à l’aimer, même un peu.
Il est tard, le lendemain elle aura 500km à parcourir, alors il est préférable qu'ils dorment. Même si elle ne l’aime pas, il a un corps attirant, rassurant, il est techniquement un bon amant malgré un manque évident de tendresse qu’il compense comme il peut par un peu de douceur, elle le sait puisque ils se sont enlacés toute leur première nuit ensemble, sans un seul moment de sommeil. Et pourquoi ne pas dormir un peu plus tard ? Pourquoi priver leurs corps ? Il en a envie lui aussi.

Ils se caressent, ils s'embrassent. Leurs corps se bousculent, se mélangent, ensemble et pourtant si loin l'un de l'autre, si seuls dans leurs plaisirs… et s'éloignent tant qu'ils peuvent dans ce lit pas assez grand.

Dormir quand même un peu, elle doit dormir quand même un peu si elle ne veut pas avoir de problème sur l’autoroute. Elle regarde l'heure. A peine deux heures de sommeil.
Le réveil sonne. Mel… Elle a rêvé. Elle l'a rêvé, seulement rêvé.
Fred… Il part, sans un regard. Elle regroupe ses affaires et quitte la chambre.

Une contravention sur sa voiture, déjà, il est à peine 8h30. Et merde… Gare de l'Est, Bastille… Autoroute A4, direction chez elle, nulle part ailleurs que chez elle… Dans son pauvre monde…

Fin.

IsabelleC.

Bruce Springsteen -Secret Garden-




samedi 25 octobre 2008

A Katherine Pancol

Elle
Encore Elle
Encore Elle et ses mots
Encore Elle et ses histoires
Encore Elle et ses personnages
Cette fois-ci, ils n’ont pas de prénom, ou trop peu, qui ne font que passer sur trop peu de pages, excepté ce nom empli de force, de rage, d’encouragements aussi, d’espoirs… Forza…
Cette fois-ci, c’est encore plus fort que la deuxième fois
Cette fois-ci, c’est encore plus fort que ce cri sourd : « embrassez-moi »
Cette fois-ci, « j’étais là avant »
Comme si j’étais là avant certaines de ses phrases
Comme si elle m’avait entendu lui raconter et
comme si elle n’avait fait que les écrire pour moi, grâce à moi, à cause de moi
Présomptueux, évidemment, évidemment que ce n’est pas pour, grâce ou à cause de moi
Mais, que ça résonne en moi encore une fois !
C’est incroyable
Ça m’en fait mal
Ça m’en raisonne, trop d’un coup
Ça m’en fait éclabousser le silence de ma lecture par des sanglots qui ne demandaient que ça depuis longtemps : sortir de moi, et danser devant moi en me criant « on est là, on ne te lâchera pas, rêve pas ma belle ! »

Le livre, un crayon : à nous deux Katerine
Hier vendredi, j’étais Angelina dans sa folie… et j’étais Mann, à l’attendre…
Hier vendredi, je me prenais à rêver « et monter lentement dans un immense amour »
Hier vendredi, passé tout entier avec vous, avec eux deux, avec aussi Madame Rosier, Monsieur Despax, j’aurai tellement voulu qu’on vienne m’enlever le jour de mon mariage…
Il y a quelques mois, je criais aussi fort qu’Angela « embrassez-moi » à qui voulait l’entendre
La toute première fois, j’ai eu peur des « yeux jaunes des crocodiles », j’ai eu aussi peur qu’elle de ne pas y arriver quand il l’a laissée avec les filles, pour partir avec l’esthéticienne à l’autre bout du monde, rejoindre les crocodiles, heureusement elle avait ses mots pour avancer
Et aujourd’hui, oui, « j’étais là avant »
J’étais là avant cette jeune femme sans prénom, moi aussi à courir après l’amour, et à le détruire dès qu’il semble montrer le bout de son nez, impuissante face à ce mal qui me ronge et dévaste tout : la peur
J’étais là avant aussi, à me précipiter dans des histoires contre des corps qui n’étaient pas les bons, et pourtant Dieu qu’ils étaient bons ces corps qui m’ont étreinte, qui m’ont enlacée, qui m’ont embrassée, à qui je me suis offerte, qui ont fouillé mes entrailles, à qui j’ai donné tout mon corps, rien que ça, rien de plus, faut pas trop en demander

Et puis Lui, Jean-Yves
A Lui, j’ai donné toute mon âme, toute ma vie, tout ce surplus dont il n’a pas voulu, mon corps lui a suffit, il m’a laissée avec tout le reste, c’est vraiment bête, tellement idiot, pour une fois que la peur n’était pas là, en tous cas pas avec moi, avec lui peut-être, mais pas avec moi…
Lui, Noël dernier, le soir on a fait l’amour sur la plage du Négresco
Lui, Noël dernier, le lendemain, il m’a aidée à me trouver belle, grâce à ses photos de moi, grâce à nos photos ensemble, lui le photographe, moi son modèle

Le livre, un crayon : à nous deux Katerine, accompagnez-moi
Je lis
Je marque
Je ne veux rien oublier
Je n’en suis qu’à la moitié du livre…

« Je n’arrive pas à aimer les hommes.
« Oh ! J’arrive à les séduire, à les circonvenir, à me jeter contre eux, à les caresser, à leur offrir le plus profond de mon corps, mais je ne les aime pas. Je ne leur donne jamais accès à une once de mon intimité. Par intimité, j’entends tout ce qui est moi, secret, verrouillé, interdit. Je ne comprends pas mon corps. Je suis plutôt généreuse avec lui. Je l’offre facilement.
« Les hommes… Je les prends quand l’envie de me fondre dans un autre corps, dans d’autres mots, dans d’autres projets, sont trop fortes, quand le besoin de deux bras autour de moi est impérieux, qu’il gèle dans mes rêves et mes entrailles. Je m’élance vers eux, m’accroche à leur bras, leur promets mille félicités, mille bonheurs domestiques ou exotiques… pour m’éloigner sans me retourner dès que je suis rassasiée.
« Je leur donne tout pour tout reprendre aussitôt. Je m’ouvre les veines pour les convaincre de ma sincérité et n’attends même pas d’avoir cicatrisé pour les rejeter. Je répète à satiété que je n’ai pas besoin d’eux pour vivre et que je suis très bien comme ça. Seule. Sans homme. Ce n’est pas vrai : l’homme est un ennemi dont je ne peux me passer. »
Je me reconnais tellement, que j’en ai peur. Je ne sais pas faire autrement, je ne peux pas. Je me déteste mais je ne peux pas faire autrement

« Mon corps s’ouvre, s’offre. Jette des défis. Tous les coups sont permis. Il n’a jamais peur. Il n’a pas de mémoire. Il ne se dit pas j’ai déjà fait ça cent fois, à quoi bon ? Ou c’est stupide, c’est ridicule, reprenons-nous, ayons l’air de… Il n’a pas d’air. Il y va fièrement, bravement, hurle, se tord, affronte, dessine de furieuses arabesques, invente, explore. Explose. Si généreux, si oublieux du qu’en-dira-t-on. Il se régale et se dépense, sans s’économiser. Il a de l’appétit.
« C’est après que la peur se profile. Quand il s’agit d’entrebâiller son âme, de laisser pénétrer un étranger dans son intimité. C’est l’heure des échanges, on abandonne un bout de son territoire pour que l’autre y pose sa brosse à dents ou ses incertitudes. »
Mon corps est toujours le plus fort, même si je me dis que la prochaine fois, il ne gagnera pas. Pour le reste… j’ai tellement peur à chaque fois, que j’étouffe, vite trop vite trop fort

« Pourquoi est-il plus facile de donner de l’amour que d’en recevoir ? »Mais d’abord, comment fait-on pour en donner ?

« - Mais je crève d’être seule… J’en crève. J’ai renoncé, c’est tout. Je suis une femme sans avenir. Tu as remarqué comme c’est froid un plateau-repas ou une télé ? »Oh que oui, c’est froid une télé, un ordinateur aussi… Plein de gens, de vies, d’histoires en dedans, mais en dehors, juste soi et sa solitude, sa saleté de solitude

« J’étais amoureuse. Je ne savais pas de qui mais tout mon être réclamait de l’amour, vibrait tendu vers cet embrasement qui m’échappait sans cesse et dont je n’avais pas le mode d’emploi. »Ce cri : viens, je t’aime, toi… I love you… ti amo… viens, je t’aime… qui ?… I love… who… chi amo… viens, je..aime… personne…

« Tant il est vrai aussi que ce qui vous saute aux yeux, vous irrite ou vous tord les entrailles est le reflet exact de vos propres manques, défauts ou souffrances que vous vous obstinez à nier, à mettre de côté. »C’est si effrayant, de se dire que c’est soi qui nous repousse comme ça… Alors quoi ? Changer soi pour accepter l’autre ? Serait-ce une des solutions ?

« Aimer… ce mot bateau qui prend l’eau de partout. Même le Petit Robert y perd sa clarté. C’est quoi aimer ? Qui est le « je » qui dit « je t’aime » ? A qui s’adresse-t-il ? Que demande-t-il en échange ? Ou bien est-ce gratuit ? Le serment d’une seconde ou d’une éternité ? Une bulle de trois mots qui crève lors d’une étreinte réussie, d’un manque comblé, d’un rêve d’enfant exaucé ? Et d’où nous vient notre manière d’aimer ? Sommes-nous les seuls ouvriers de cet échafaudage branlant ? Qui a mis en place les traverses et les boulons, les poulies et les planches où nous avançons en aveugles tâtonnants, persuadés d’être libres et conquérants ? »Une réponse ? Aimer c’est quoi ? Aimer comment on fait ? Aimer, pour quoi faire ? Aimer, pourquoi ?
« Aimer, c’est comprendre et sentir que l’Autre est différent. » Swami Prajnanpad
Mouai, tu parles… Encore un précepte, une sagesse pour ceux qui savent… Pourtant cette phrase, elle sonne tout doux à mon cœur… Il ne me reste qu’une seule chose à faire : juste trouver comment on fait

« La vie ! Mon point de vue sur la vie ! Si je le savais au moins ce que je pensais de la vie ! Ce serait tellement plus simple ! Je regardais à l’intérieur de moi et ne voyais personne.
« Je ne pensais pas, je réagissais. Tour à tour agressive, hostile, soumise, lâche ou peureuse. Un petit animal à l’état sauvage qui flaire le danger, égorge les poules et file dès qu’on veut l’approcher. »
« C’est en trouvant la Paix avec soi, qu’on peut vivre en Paix avec les autres. » Dalaï Lama
Ok. Alors vite, un plan de soi-Moi. Je suis où là ? Je suis en plein courant d’air au croisement de la rue de Nice et de la place des souvenirs, tout près de l’impasse Jean-Yves-Mon-Amour. Avant, je ne sais pas. Après, je ne sais pas non plus. C’est où la rue de la Paix sur mon plan ? Et il n’y a même pas un index des rues, je suis complètement perdue, comment je vais faire…

« - Leçon numéro 2 : si vous n’avez rien à dire, ne le dites pas. N’étoffez pas votre ignorance à grands coups d’éloquence. Si vous peinez à décrire des toits de chaume et des champs d’iris, des intérieurs bourgeois et des armoires normandes, ne le faites pas. Ce n’est pas vous. Allez dans ce que vous vous sentez capable de faire. Style et structure sont l’essence de l’écriture, les grandes idées ne sont que foutaises… »J’aimerai écrire… J’aimerai savoir raconter l’indescriptible, ne serait-ce que pour le sortir de moi, le jeter hors de moi, le balancer hors de mes demains…

« Mais je ne sais rien de la vie. Je la subis en donnant des coups de dents, au hasard, pour me défendre. Je suis impatiente, violente parfois, méchante. Je déteste ce monde où je n’ai pas ma place. Je déteste les gens qui ont l’air si à l’aise dans ce monde où je n’ai pas ma place. Je les déteste et je les envie. Comment font-ils pour parler, pour s’exprimer, pour avoir la peau si nette, les cheveux si bien coiffés ? Qu’est-ce qu’ils ont mangé ? Avec quel savon se sont-ils lavés ? Quels livres ont-ils lu ? Qui les a écoutés quand ils ont prononcé leurs premiers mots ? Qui les a encouragés, applaudis peut-être ? Il sont nés tout armés. Protégés et sûrs d’eux. Je fais tout pour leur ressembler et je ne réussis qu’à les singer. Je suis une pauvre imitation de ce que j’imagine qu’il faut être. Je fais semblant tout le temps. Je deviens blonde, toute blonde. Le visage beige, tout beige. Le sourire éclatant, tout en dents. Et je n’attrape que des bribes de cette vie qu’ils semblent maîtriser avec tant d’aisance. Leur place est réservée, je me tiens debout, en équilibre, en liste d’attente. »Au premier jour, pas le bon berceau, pas la bonne vie, pas celle que j’aurais aimée –pas celle qui m’ira, ça se voit à la longue, je ne sais toujours pas quoi en faire, elle est bien trop petite… mais qui… l’enfant ? ou la vie qu’on lui donne ?–… Mais la mienne, et je dois faire avec, on compose toutes les deux, elle et moi… Un jour après l’autre, une note après l’autre, une blanche, deux noires et encore d’autres croches, trop, doubles, triples, si peu de rondes, un soupir puis un silence, puis un autre puis encore un autre… Une autre mesure, une autre danse… C’est mon chemin ça ? Et j’ai fait quoi dans mes vies antérieures pour mériter ça ?

« La vie m’a cogné dessus, je lui cogne dessus, et je ne comprends rien. Ça revient au même. »
Et à la fin, qui gagne le match ?

« - On ne sait jamais, je me disais, c’est peut-être le bon… J’avais tellement envie qu’on m’aime et qu’on me regarde.
« - Tu étais prête à l’habiller de toutes les qualités, tu le transformais aussitôt en homme parfait et le hissais haut en sommets. Il ne pouvait que dégringoler ensuite et toi, tu le détestais, tu étais malheureuse d’avoir été flouée. Mais tu t’étais flouée toute seule…
« - Je ne tombais pas amoureuse parce qu’il était séduisant, plein de fric ou puissant mais parce qu’il me regardait… S’il me regarde, c’est que je vaux quelque chose. S’il me regarde, je déplacerai des montagnes pour lui. »

Et j’ai fait du mal, j’ai détruit, plusieurs fois. La dernière fois, il n’y a encore pas si longtemps, quelques jours seulement… Je me déteste, je me hais, mais je n’arrive pas à m’en vouloir… Je fais ce que je peux… Ce n’est pas volontaire… Et la fois d’avant, je n’ai pas voulu faire autant de mal, je me suis seulement défendue, je ne me suis pas laissée bafouer, pas cette fois

« - Tu as mal à la tête ?
« Il est parti quelques jours. Je dors, entourée de ses cadeaux, enveloppée dans son écharpe noire, sa chemise noire [liberté personnelle], son odeur d’aisselle brûlée, le téléphone dans la main.
« - Je t’envoie un chèque pour l’aspirine…
« Il s’occupe de moi. Se penche sur mon berceau. Ses mains ruissellent d’offrandes. Je suis son enfant, son nouveau-né, je me recroqueville dans sa paume. Puis il me prend dans ses bras et devient un autre, mystérieux, terrifiant parfois ou si doux, violent ou patient, m’entraînant dans une multiplication de mon être que je découvre, stupéfaite. Jamais le même, jamais la même. Je touche du bois pour que ce bonheur dure et que personne, personne ne lui coupe les ailes. »
Je touche du bois, pour le rencontrer ce bonheur, celui qui fait vibrer, celui qui fait vivre, celui qui n’étouffe pas, celui qui aide à respirer, celui qui apaise… Celui qui aide à rêver de jolies choses… Celui qui fait Être. Je touche du bois, je croise les doigts, je ne passe pas sous les échelles, j’évite les chats noirs… Quoi d’autre ? Et si j’allais allumer des cierges, peut-être… Trouver de toute urgence un trèfle à quatre feuilles… Ou alors, si j’arrivais tout simplement à croire en Moi et à Me faire confiance… Mais je me suis tellement déçue…

Je ne suis pas encore allée plus loin…
Il est tard, demain la journée s’annonce longue
Je reviendrai demain soir

Je n’ai pas pu
Je n’ai pas pu refermer le livre
Je suis allée au bout
J’ai lutté contre le sommeil
Lire la fin de l’histoire
ou fermer le livre et dormir… non, ça je ne peux pas
Aller jusqu’au bout de toutes ces résonances
Oui
Aller jusqu’au bout de toutes ces prises de conscience que vous éveillez en moi dans chacun de vos écrits
Surtout celui-ci
Il résonne, il me raisonne
Le choc est violent
Mes petits rouages, ces petits repères que j’ai eu si mal à bâtir, sont bien fragilisés, explosés pour certains, complètement disloqués
C’est douloureux, mais ça me fait avancer
Ça me secoue avec force, ça me remue trop fort
Mais il faut que j’aille jusqu’au bout ce soir, ou cette nuit, peu importe, mais maintenant

« Il ne faut pas me dire des choses brusquement, comme hier, dans le salon de thé. Je ne peux pas les entendre, je ne suis pas prête. Ne me donne pas de l’amour à grandes louchées, je ne peux pas l’avaler. C’est comme si tu gavais un affamé du Sahel, tu le ferais crever. »Vous êtes sûre que c’est de l’amour ? Je n’appelle pas ça de l’amour, j’appelle ça de l’escroquerie, de l’abus de pouvoir, de la corruption de l’autre, pour se l’approprier, faire de l’autre sa chose. Non, je ne peux pas. Le dernier a essayé, j’ai vraiment pas pu. Laissez-moi ma liberté, même si elle est trop lourde des fois, ma liberté de « Mademoiselle »… Laissez-moi mes ailes, s’il vous plaît.

« Aimer, je ne sais pas, j’imagine, j’essaie de savoir avec toi… Aimer, c’est savoir ce dont l’autre à besoin et dans quelle quantité. Ne pas le bousculer, ne pas le prendre d’assaut. Ce n’est pas seulement répondre à ton besoin de donner, d’aimer, c’est s’adapter à l’autre. Je ne peux pas prendre tout ce que tu me donnes en insistant si lourdement. Cela me donne envie de régurgiter… Je t’en supplie : écoute-moi, sois patient, avance lentement… »
Aimer c’est s’adapter à l’autre, c’est l’accepter comme il est et non pas comme on voudrait qu’il soit, pas comme on l’idéalise, pas comme on le fantasme. Mais alors comment trouver la justesse d’aimer l’autre comme il est tout en ne se limitant pas dans nos désirs ? Comment aimer sans tomber dans l’abnégation ?

« Le manque ne se laisse pas rabrouer. Il s’installe en maître. Il s’infiltre dans son royaume : l’imagination. Il produit des diapos, des photos, des instantanés qui glacent le sang. »
[…]
« Le manque de toi devient alors violent.
« Il m’emmène dans une dérive où je n’ai plus le goût de rire, de chanter, de m’étirer au soleil, de suçoter le coin négligé d’une tartine, de faire le clown pour refiler aux autres un peu de mon bonheur. Je suis triste soudain, rabougrie, éteinte. Recroquevillée, exsangue. Le manque est trop fort. C’est lui le maître. Il veut toute la place et efface le souvenir des plaisirs et du bonheur partagés. Je suis le manque tout-puissant, vous devez trembler devant moi, tout me donner car je suis insatiable, un ogre, un vampire, un serial killer de bonheurs avoués et énoncés à haute voix.
Il s’infiltre dans le cœur de sa victime et lui suce l’humeur qu’un instant auparavant elle avait rose et tendre. Elle pensait à lui, le seul homme au monde, à la seule chair délicate à déguster, la seule âme »
[…]
« Et il l’arrête net, d’un coup d’épingle. Il l’écartèle et la pique de part en part.
[…]
« La souffrance m’étourdit comme un violent plaisir, pour me laisser pantelante, le cœur dévasté mais sûre d’exister, de me torturer pour lui.
« Toujours lui, encore lui….
« Le manque accomplissait son travail inexorable et je n’avais pas la force de lui résister. »
Après tout ce temps, bientôt un an, il me manque encore. Ce manque je le sens dans tout mon être, dans tout mon corps. Après bientôt un an d’une passion qui n’aura duré physiquement que dix jours. Les dix plus beaux jours de toutes mes histoires d’amour… Pourquoi ça fait si mal encore maintenant ? Et cet autre soir, il y aura bientôt 3 semaines, où j’ai vu son nom à la télé, un sujet du 20heures de France 2, moi qui ne regarde jamais les informations, pourquoi ai-je allumé le téléviseur ce soir-là ? Et comme par hasard ce soir-là un sujet par une des équipes d’Antibes, et comme par hasard aussi, son équipe… Son nom à la fin du sujet… Un coup d’une violence inouïe bien que je l’ai vu arriver ce coup, dès que j’ai entendu la voix de la journaliste, Nathalie, je la connais bien cette voix. Je l’ai vu arriver mais je ne pouvais pas zapper ou éteindre, non, c’était impossible, voir son nom c’était le revoir un peu lui, ne surtout pas zapper, non ! Le reprendre quelques secondes tout contre moi. Un bonheur glacial, les doux souvenirs et puis le manque insupportable. Alors ce sms que je lui ai envoyé « coucou, bonne nouvelle tu n’es pas mort […] ;-) bises ». Et lui de me répondre deux jours plus tard, en substance « je vais bien, je suis amoureux […] et toi comment tu vas ? »
Amoureux… a-m-o-u-r-e-u-x… ces quelques lettres, elles sont 8, accrochées les unes aux autres se sont jetées violemment dans mes yeux, elles ont percuté mes rétines, elles ont forcé le passage jusqu’à mon cerveau qui lui s’est vite dépêché de transmettre l’information à mon cœur. Panique, alerte, comment je fais ? J’ai froid tout d’un coup, mon sang se glace, je me tétanise, je ne peux plus bouger, je deviens sans doutes livide, je n’arrive plus à respirer. Rappelez-moi comment on fait pour respirer, je ne sais plus. Et je me dois de sauver les apparences, comme si de rien n’était, je suis au bureau, et ma vie privée ne regarde strictement personne. J’ai envie de hurler, j’ai envie de pleurer, j’ai envie de te traiter de tous les noms, de t’étrangler, de t’embrasser, de te dire qu’elle ne t’aimera jamais aussi fort que moi… Et puis tu me disais que Lyon était trop loin de Nice, que tu ne voulais plus de kilomètres entre toi et ton élue… Tu habites toujours à Nice, elle habite à… Strasbourg… Et puis elle est déjà mère, et puis elle fait le même métier que toi, et puis elle n’a pas de problèmes de fric, et puis elle est aussi vieille que toi, toi qui n’est pas vieux, non, tu n’as que 42 ans, mais elle si, j’en suis sûre, ridée de partout, et flasque, et dégringolante de cellulite… Te fait-elle aussi bien l’amour que moi ? Moi que tu disais ton « idéal sexuel » et ça m’allait si bien même si c’était tellement réducteur, pour moi c’était déjà ça… L’as-tu vue, elle, te donner son plaisir comme je t’ai donné le mien, dans les grands miroirs de ta salle de bains, ou de ta cuisine ?… Et j’ai répondu à son sms « comment je vais ? j’ose même plus regarder le JT de France2 tellement j’ai eu mal de voir ton nom la dernière fois. cette nuit tu étais dans mon rêve, ça faisait longtemps, et ça fait toujours aussi mal. alors j’essaie d’avancer, j’essaie d’aimer ou de faire semblant. mais ça marche pas… ». Plus de deux semaines… Je n’ai pas eu de réponse… Etonnant… Et tu ne me répondras jamais, parce qu’au final, je ne compte pour toi pas autant que tu as voulu me le faire croire… Et cette idée me tranche le cœur, m’anéantit, ruine tous mes efforts pour essayer d’avancer. Comment je vais faire sans toi même loin ?

« Sans ton regard attentif et brûlant, sans tes bras autour de moi, je ne sais plus marcher, je ne sais plus parler, je ne sais plus écrire. J’ânonne la vie comme une enfant qui apprend à lire. »Sans lui je ne sais pas vivre, je suis seulement en survie. Les six premiers mois, je ne tolérais même pas qu’un homme puisse me toucher. Je devais réapprendre à respirer, à me laver, à marcher. J’avais repris le travail, je n’ai pas pu tenir plus de six semaines. Je n’avais même plus la force de m’occuper de Berlin, mon chien d’assistance que j’éduquais, je l’ai rendu à son association la veille de mes 33 ans, le 5 mars dernier. Berlin qui est arrivé dans ma vie un 13 février, en 2007, et que j’aurais dû rendre un 10 novembre, l’année suivante, dans quelques jours en fait. Je suis tombée enceinte un 13 février, juste avant mes 30 ans, j’aurais dû accoucher un 10 novembre, et là aussi j’ai décidé de tout arrêter en route, au bout de huit semaines, parce que je n’avais déjà pas la force. C’est curieux comme les schémas ou les dates se perpétuent, de façon plus ou moins flagrante, plus ou moins violente, mais toujours…

« Elle ne ressentait rien. Rien qu’une vague gêne de voir un homme pleurer. Ça ne pleure pas un homme…
« Ou alors ça pleure pour de vraies héroïnes, pour de nobles causes. Pas pour quelqu’un comme elle. Elle n’en valait pas la peine. S’il était intelligent et fort, il le saurait. »
Et un autre homme pleure maintenant… Je lui ai dit dès le départ que je n’en valais pas la peine, il a insisté… Tant pis… Je n’y peux plus rien…. Je l’avais prévenu. Je n’aime pas ça, je déteste ça, mais c’est ainsi.

« Et dix ans après je recommence. »
C’est curieux, c’est ici, aux ¾ du livre, que je prends conscience que vous écrivez à la première personne, «Je». Seulement ici…

« J’étais si seule avant de le rencontrer. Avec lui, j’ai plongé dans une intimité dont je ne peux plus me passer. »
Les dix plus beaux jours de toutes mes histoires d’amour, lui, moi, nous, ensemble, nous deux… Nous… Je n’avais jamais dit «Nous» comme ça… Jamais…

« J’ai tout compris. Ma rage assassine, mon envie de tuer les gens qui m’approchaient et qui voulaient m’aimer. Je ne voulais pas qu’ils m’aiment, je voulais que TOI, tu m’aimes. TOI, TOI, TOI »
Mon père… Ma mère aussi… Les deux… Je suis boiteuse des deux côtés

« Ce soir-là, en un éclair, je me suis retrouvée seule face à moi. »
Cette nuit à vous lire, en un éclair, je me suis retrouvée seule face à moi, mais j’ai senti un vide se combler, un point d’interrogation se transformer en point d’exclamation. Merci Katherine, merci de tout mon cœur, de toute mon âme, de tous mes amours, Merci ! Même si j’ai maintenant l’impression que tout est bancal et que je vais sûrement avoir très envie de retourner à avant, avant vous avoir lue, avant que ce point ne se transforme… Par facilité, fuir… Je vais batailler, cette guerre contre moi-même va être longue et difficile… Je n’ai qu’une certitude : quelle qu’en soit l’issue, j’en serai toujours la gagnante, puisque cette guerre, je la mènerai contre moi, et avec moi

« Je ne la déteste plus, je n’attends plus rien d’elle, je la respecte. Je respecte son mal-être mais je reste à distance. »
Rien à rajouter, si ce n’est que je la respecte, ma mère, et je le respecte aussi, mon père, et je reste à distance aussi. Du respect rien de plus. Et de la distance, le plus possible, le plus loin possible

« Il faut du courage pour être heureux. Se retrousser les manches et ne jamais renoncer. »
Combien de fois ai-je eu envie de baisser les bras, de laisser tomber. Combien de fois me suis-je dis « c’est pas pour toi le bonheur, c’est pour une autre ». Combien de fois me le dis-je encore… Tiens, Cali vient dans mes pensées fredonner sa première chanson « C’est quand le bonheur »

« Dans une histoire d’amour, on n’est jamais deux face à face, jamais isolés dans un imaginaire libre et généreux. On est tous les autres et toutes les autres qui ont aimé avant nous. Une longue chaîne de forçats menaçants qui nous tirent en arrière et nous lestent de leurs vieux conflits, leurs vieilles fripes, leurs masques grimaçants, leurs cœurs dévastés, impuissants. Nos mères et nos pères, nos grands-mères et nos grands-pères, nos arrières-grands-mères et nos arrières-grands-pères. Ainsi de suite…
« On porte, sans le savoir, leurs peurs et leurs angoisses, leurs rancœurs et leurs haines, leurs élans brisés et leurs blessures ouvertes, leurs espoirs déçus et cette scie meurtrière : on ne m’y reprendra jamais plus, jamais plus, jamais plus. Comme si l’amour n’était qu’une guerre en plus, un règlement de comptes impitoyable, une histoire de succession jamais fermée. Tous ceux qui murmurent à nos oreilles sans qu’on les entende : « J’étais là avant » nous bousculent, s’installent dans nos vies, y déroulent leurs histoires et nous bouchent nos plus beaux horizons. »

Comment faire pour briser toutes ces chaînes ? Les briser pour soi, pour ceux d’après ? Comment ? C’est trop lourd à porter tous ces héritages familiaux, ces héritages transgénérationnels… J’en peux plus moi… Pourtant maman se dit psychogénéalogiste, mais comme on dit, ce sont les cordonniers les plus mal chaussés

« L’amour c’est quand l’autre vous regarde, pose son regard sur vous et voit, au fond, des pépites que vous ignorez, les exhume et vous les apporte. Pour vous enrichir, vous agrandir, vous rendre libre. Le regard d’amour qui fait de vous une autre, vous donne de grands espaces où galoper ivre de bonheur et de fierté. Je suis moi et je suis quelqu’un de formidable parfois, de moins formidable d’autres fois. »
Avec lui… J’acceptais ce regard qu’il posait dans le mien, ce regard qui me faisant tant de bien… Pour la première fois… La dernière peut-être… Jean-Yves tu me manques, j’ai mal…

« C’est ça l’amour, je me suis dit en ouvrant la fenêtre et en tendant mon visage au soleil. C’est donner des forces à l’autre pour qu’il se sente libre et sûr de lui. »
Et j’en ai tant besoin de forces… Pourquoi je refuse toujours quand on veut m’en donner, et pourquoi je m’obstine à en demander et en recevoir d’hommes qui n’en ont qu’à peine suffisamment pour eux, ou qui préfèrent tout garder pour une autre… Et des forces j’en ai à peine pour moi, alors je ne peux pas en donner à un autre, c’est impossible…

J’ai terminé le livre, il était presque 3 heures du matin
Je l’ai refermé, presque paniquée en me disant « et maintenant ? qui va me guider ? je vais lire quoi d’Elle ? demain, on sera dimanche, les librairies seront fermées, alors j’irai chez les bouquinistes trouver autre chose d’Elle, de son monde dans lequel je trouve une petite place, autre chose de ses mots qui s’alignent comme j’aimerai tant aligner les miens… »

J’ai lu ce livre à ce moment précis de ma vie, il était déjà depuis quelques mois dans ma bibliothèque, mais je ne l’ai ouvert qu’hier… Il n’y a pas de hasard… Si je l’avais lu un peu avant, il n’aurai pas eu tout ce sens pour moi… Non, il n’y a pas de hasard, vraiment pas.
« Il n’y a pas de hasard, il n’y a que des rendez-vous » Paul Eluard
J’aime quand j’ai rendez-vous avec vous

Katherine, merci

Isabelle


Post Scriptum :

Je réalise que je ne me suis pas présentée, quelle impolitesse de ma part

Je suis Isabelle C., j’ai 33 ans et puis… et puis les détails n’ont aucune importance
Vous m’aviez déjà fait l’honneur d’échanger avec moi quelques mails, et vous aviez lu mon histoire, il y a quelques mois, après que je me sois plongée à cœur perdu dans votre livre « Embrassez-moi »

Et j’ai envie de vous offrir une de mes photos
« Vieux Rose Noir », un titre à plusieurs sens, à chacun de trouver le sien
Une photo faite pour Lui en mars dernier, puis laissée de côté parce que je l’estimais ratée, et je l’ai ressortie de mon « grenier » et l’ai retravaillée il y a peu de temps, sans trop savoir pourquoi
Et je sais maintenant, je sais que c’est cette photo que j’ai envie de poser à côté du message que j’ai reçu de votre livre « J’étais là avant »
Le tirage n’est pas exceptionnel puisque sur mon imprimante, mais si l’image vous plaît, et si vous le désirez, ce sera pour moi un grand plaisir que de vous en envoyer un exemplaire grand format, si vous le souhaitez

La photo, une passion qu’il ma transmise
Une passion ? ou bien pour moi un moyen inconscient d’essayer de le retenir…
Alors je m’y accroche, même si je sais qu’il ne reviendra plus, il ne vient même plus me donner son avis sur les images que je met en ligne sur un site où lui aussi a ses propres photos, dont quelques unes de moi d’ailleurs, de ce jour de Noël dernier
Alors je m’y accroche, je persévère, parce que cette fois-ci, je ne veux pas lâcher sous prétexte que cette passion me vient de lui
Ou peut-être que je ne veux pas lâcher justement parce que cette passion me vient de lui
Que de pensées inextricables, je n’arrive plus à trouver le bout de la ficelle pour démêler la pelote

Voilà
Que vous dire d’autre…

Rien, si ce n’est
MERCI KATHERINE
Merci de me réveiller, de m’ouvrir les yeux, de me secouer parfois
Merci de me mettre face à moi
Merci de ces rendez-vous
Merci

lundi 20 octobre 2008

Ce matin, trop tôt

ce matin trop tôt
5 heures
les yeux grands ouverts
et mon rêve qui me revient
il était encore là cette nuit
lui
lui, toujours là
lui, toujours tellement là après tellement de temps
lui, qui m'a donné ma plus belle histoire
lui, qui m'a volé ma plus belle histoire
lui, qui a sali ma plus belle histoire...
avec lui
lui, qui m'obsède encore bien trop quand je ne m'y attends plus
quand je me crois guérie
lui, qui me hante à chacune de mes rencontres
lui, qui me revient sans crier gare
à chaque fois que j'ai envie de croire que je peux à nouveau espérer
lui, à cause de qui je détruis un autre, bien contre ma volonté
et bien contre tous mes espoirs, saura-t-il me pardonner un jour ?
lui, grâce à son regard je me suis sentie si belle
lui, à cause de qui je me déteste tellement
lui, qui me bouffe tous mes souvenirs
ceux d'hier
ceux d'aujourd'hui
ceux de demain
lui, que je ne peux cesser d'aimer malgré tout ce mal
lui, à qui je dois tellement aussi
lui
et merde...
ce matin trop tôt
j'ai comme encore cette envie inconditionnelle de me tailler les veines...
pas le courage, comme toujours...

IsabelleC. à Jean-Yves

lundi 29 septembre 2008

Insomnie... une autre...

le sommeil ne vient pas
il laisse sa place à l'insomnie
et à l'envie aussi
envie de dormir dans tes bras
envie de me blottir contre toi
envie de sentir nos peaux l'une contre l'autre
envie que cesse cette bataille entre mes sens et ma raison
mes sens...

qui me dictent de sauter dans la voiture et avaler les 750 km qui nous séparent
et me jeter dans la gueule du loup
ma raison...
750 km maintenant c'est de la démence
dans ta gueule de loup que je ne connais pas
c'est de la pure folie
mais une folie si douce
mes sens qui s'entrechoquent au fond de mon ventre
chaud
froid
force
douceur
volupté
frustration
vide
appel
manque
manque d'un homme que je n'ai jamais rencontré
que je lis seulement
et que je crois percevoir entre ses lignes
magie du net ?
ou aliénation de la solitude ?
des questions
encore des questions
des questions sans réponse
et après tout ça changera quoi d'avoir ces réponses ?
rien
ça ne m'empêchera pas de vouloir vivre l'union de nos deux corps
mélanger nos odeurs
pour en faire un parfum
le parfum de nos plaisirs
la fragrance de nos ébats
l'essence de notre jouissance
qui s'appellerait : POSSESSION

IsabelleC. à un mirage qui se prenait pour un loup

samedi 27 septembre 2008

Cliché

Dans mes moments de solitude
quand je regarde en arrière
quand je repense à tous les hommes que j'ai laissés entrer dans ma vie
je me dis que je me laissais séduire par des apparences
des apparences qu'ils savaient se donner
des apparences auxquelles je voulais bien croire
et qu'il manquait toujours quelque chose
mais quoi ?

Ce soir je pense avoir une vague idée de ce quelque chose
ce quelque chose qui est en fait un tout

Et la question à laquelle je pense avoir trouvé un début d'embryon de réponse est
qui je recherche
qui est cet homme dans les bras duquel je pourrai enfin m'abandonner
me laisser aller
cet homme à qui je pourrai me donner en confiance

Cet homme je le désire solide, stable et tendre et fidèle
fidèle à lui même
un homme fort avec un cœur de gosse

Je sais c'est très cliché...

IsabelleC.

vendredi 12 septembre 2008

Insomnie

une nuit
quelques mots qui tournaient dans ma tête
quelques mots qui formaient quelques phrases
quelques phrases qui pouvaient bien la raconter, la raison de cette insomnie
alors je me suis relevée
pour aller boire un verre d'eau
et j'ai passé un kimono
et j'ai rouvert mon ordi
et avant de revenir ici
je me suis promenée un peu
de clic en déclic
au gré de ma souris
comme promis j'ai lu "Mercredi"...
et puis envolés les quelques mots qui tournaient dans ma tête
envolés les quelques mots qui formaient quelques phrases
envolées les quelques phrases qui pouvaient bien la raconter, la raison de cette insomnie
mais l'insomnie elle ne s'est pas envolée
non
elle est là avec moi
elle est toujours accrochée à moi
elle envahit mes pensées
bien trop bruyantes
elle envahit mon lit
bien trop grand
pour tout ce vide
et nous sommes déjà vendredi...

IsabelleC.

vendredi 5 septembre 2008

Où ?...

 










































Où ?
Elle est où cette jeune femme
Celle qui jette ses mots sur ce blog ?
Celle qui sait rire
Celle qui sait charmer aussi un peu
Elle est où ?
Peut-être est-elle partie dans une des deux barques là juste à droite de la page, un peu plus bas
Avec l'autre jeune femme, celle qui a mal, juste à côté de ces quelques lignes
A la recherche d'autres yeux pour s'y poser et s'y rassurer Peut-être...
Si vous la croisez, dites-lui que je l'attend...

IsabelleC.
photo IsabelleC.

jeudi 4 septembre 2008

Il y a des soirs...

 










































il y a des soirs
comme ce soir
où l'on est face au silence
face à soi
face à rien
où l'on voudrait que tout s'arrête
net

il y a d'autres soirs
comme ce soir-là
où l'on est dans des bras doux
des bras tendres des bras aimants
où l'on voudrait que rien ne s'arrête
jamais

il y a des soirs
il y a des histoires
IsabelleC.
photo IsabelleC.

vendredi 22 août 2008

Trois...

trois
donne-moi trois bonnes raisons de continuer la photo
le doute m'envahit
je n'y crois plus
pas seule, j'y arriverai pas, plus seule
sept ans seule... c'est trop long, trop insupportable
et la photo, ça ne comble pas
juste envie de balancer mes appareils par la fenêtre
juste envie de brûler mon book
juste envie de pulvériser mon disque dur
juste envie qu'on avance un peu pour moi, mais ça, c'est impossible
plus envie de regarder le monde différemment
plus envie de me laisser toucher par tous ces moments que je capture, que j'emprisonne d'un simple déclic
plus envie de me mettre à nu à travers l'objectif
plus envie de dévoiler qui je suis, ma sensibilité, mes émotions
plus envie d'avoir la moindre émotion, le moindre ressenti
juste envie de refermer le cache de l'objectif définitivement
donne-moi trois véritables raisons de continuer la photo
donne-moi trois raisons sincères de continuer la photo
et sors de ma vie
on s'est croisés
on s'est donné tout ce qu'on avait à se donner
je ne voudrais pas qu'on arrive à se voler l'un l'autre
je ne voudrais pas qu'on arrive à se servir l'un de l'autre
(...)
ne nous oublions pas
tu es passé chez moi, tu as fait du bruit, un très joli bruit
mais un bruit suivi d'un silence insupportable
ce silence de l'attente, de l'attente de quoi...
(...)
alors sors de ma vie

IsabelleC. à un voleur de bonheur

mardi 29 juillet 2008

Tu pouvais pas savoir...

je viens de voir ton message...
...voilà, tu pouvais pas tomber plus mal
tu savais pas
pas grave
juste dans l'ambiance de cette fin de soirée pitoyable ou j'ai pleuré dans les pattes de mon chien
et malheureusement tout n'est pas sorti
je suis fatiguée de cette putain de solitude
je sais, il y a des soucis bien plus graves
mais je supporte plus, j'en peux plus ce soir
et je me sens moche et tout ce qui va avec
suis plus capable de rien
j'arrive même plus à faire une photo potable
tiens, je zappe et je tombe sur Six Feet Under sur Canal Jimmy
je me dis qu'à 6 pieds sous terre on est peut-être mieux, plus tranquille, ou moins emmerdée tout du moins
chai pas, je dis n'importe quoi, pourtant j'ai rien bu
ah si, peut-être une overdose de céréales au chocolat...
tu sais quoi ? "mon Ecrivain" m'a contactée sur msn et on s'est demandé si je ne voulais pas venir le rejoindre pour une nuit de baise
j'ai d'abord hésité puis finalement, le temps que je me décide, lui a changé d'avis
sans doutes mieux, oui, bien mieux comme ça... dommage quand même...
je continue de zapper : un film érotique de seconde voire troisième zone...
quelle merde cette télé! chaîne suivante...
et tu sais quoi ? le paradoxe : c'est que j'ai même pas envie d'être dans les bras de quelqu'un...
oh j'en sais rien, peut-être devrai-je reformuler : personne ne me donne envie de me blottir dans ses bras
et ça c'est la solitude, oui, je crois que c'est aussi ça être seule et n'avoir personne à qui penser, n'avoir personne à avoir envie d'aimer (bon, pas la bonne conjugaison, mais tu remettras dans l'ordre)
plus envie de rien
juste que cette vie minable s'arrête, d'une façon ou d'une autre
soit par un changement rapide et radical et bénéfique et épanouissant et qui me rende heureuse (j'en demande trop là ?...)
soit par un grand STOP bien net et bien précis
mais on a besoin de moi
et puis j'ai encore plein de trucs à faire...
j'ai encore zappé : French Beauty, un documentaire sur la beauté des actrices françaises...
et bien sûr les plus moches : Juliette Binoche, Emmanuelle Béart, Isabelle Huppert, Jeanne Moreau, Catherine Deneuve (je la suppose regonflée labbialement au botox, mais à son âge on lui pardonne), sa fille Chiara Mastroiani, Amira Casar, Sophie Marceau, Jane Birkin et ses filles Lou Doillon et Charlotte Gainsbourg, une petite blonde qui monte je sais plus son nom, enfin les plus moches quoi... sans oublier Laetitia Casta... pas une seule ronde ou gironde ou boulotte, aucune, rien
et en plus la Binoche elle parle un anglais parfait... y a vraiment de quoi se sentir conne, vraiment...
alors oui, j'ai deux ou trois photos de moi où je suis jolie, mais ce ne sont que des photos
tu verrais ma tête en ce moment : les yeux gonflés d'avoir chialé, des boutons plein la tronche (merci les hormones), un cou de grosse vache, un bide que j'avais le même enceinte de 9 semaines (bin oui, chui allée jusqu'à 9 semaines 1/2... "you can leave your hat on..." ), et une cellulite à faire pâlir d'envie les femmes parfaites du XVIIIe (tu sais, celles sur les tableaux du Louvre entre autre, les sex-symboles de Rembrandt et ses copains...)
si encore j'avais un boulot intéressant, un peu de fric, un salaire agréablement correcte, si j'étais proprio de mon appart', une voiture qui ressemble à une voiture et pas à une poubelle (si, regarde bien, sur ma twingo, y a deux poignées sur les côtés pour la porter, comme les poubelles)
et avec des "si", on met Paris en bouteille...
putain...
j'tourne même plus en rond, là, j'tourne en carré...
j'vais m'coucher
demain y devrait faire jour, ou soleil, enfin je ne sais plus ce qu'ils ont dit à la météo...

IsabelleC. à mon amie Ben